La visite inopportune du premier Ministre Moussa Mara à Kidal
Au Nom de Dieu Clément et Miséricordieux
A Monsieur le Premier Ministre du Mali
Vous avez ouvert la voie aux hostilités
Monsieur le Premier Ministre, votre visite à Kidal, si elle ne constitue pas un acte de provocation, elle a planté tout au moins le décor de la reprise des combats, la déstabilisation assurée de la zone et la destruction du fragile climat social qui y régnait. En réalité qu’a-t-elle apporté aux habitants de Kidal, cette visite très inopportune sinon la peur, la violence, les exactions. A-t-elle confirmé aux habitants de Kidal que cette région est toujours partie intégrante du Mali. J’en doute fort avec la reprise du gouvernorat et de la ville de Kidal par le MNLA. Les accords de Ouagadougou signés en juin 2013 stipulent dans leur préambule que tous les signataires reconnaissent l’intégrité du territoire national. N’est ce pas là une preuve suffisante du rattachement de Kidal au Mali ?
Monsieur le Premier ministre, vous avez péché par orgueil démesuré et par inexpérience seulement que se passe-t-il en ce moment ?
• Les combats ont repris. Ménaka et Anderamboukane sont tombées aux mains des révolutionnaires du MNLA/MAA. Le rouleau compresseur s’est déclenché, et les prochains jours nous édifieront. L’alerte est à son paroxysme dans tous les camps, malien, groupes armés, minusma ;
• La mort presque consommée des accords de Ouagadougou arrachés au prix d’normes sacrifices consentis par toutes les parties et la communauté internationale ;
• Les manifestations contre les touaregs se multiplient à Gao où déjà le spectre des années 1992, 1994 et 2012 refait surface avec le lynchage des membres de la communauté arabo berbère, les attaques contre les commerçants et leurs biens ;
• La réaction toute naturelle et très attendue des mouvements armés qui ne resteront pas les bras croisés devant les assassinats de leurs populations et la spoliation de leurs biens ;
• La déception de la communauté internationale qui a mobilisé tant de ressources et de moyens matériels pour résoudre cette crise.
Quelle malédiction ! Au moment où les efforts de Monsieur Modibo Keita, Délégué spécial du Président IBK, les efforts de la France et des amis du Mali étaient à deux doigts de fixer le calendrier des rencontres, voila que Monsieur le Premier ministre, vous organisez une visite des régions du Nord pour prouver au Monde entier que Kidal est une partie intégrante du Mali. Monsieur le Premier ministre, les élections présidentielles tenues à Kidal, le drapeau malien qui flottait sur le gouvernorat de Kidal, la présence de l’administration à 80 % d’origine sudiste, les directions régionales qui fonctionnaient ainsi que les services techniques locaux, ne suffisaient-ils pas à le prouver ?
Monsieur le Premier ministre Qu’étiez-vous allés chercher à Kidal ?
- Rassurer les populations locales ? C’est raté : les populations sont calfeutrées chez elles.
- Rétablir l’ordre ? C’est encore raté. Aujourd’hui à Kidal est entre les mains du MNLA et la guerre est aux portes des villes de Gao et Tombouctou, où la tension est à son comble.
- Confirmer l’appartenance de Kidal au Mali ? C’est toujours raté : le drapeau du MNLA flotte sur le gouvernorat de Kidal pendant que vous étiez encore sur place.
- Stabiliser la zone ? C’est raté : Tous les mouvements sont sur le pied de guerre y compris serval et la minusma. Les routes fermées, les commerces fermés, la circulation interrompue aux entrées et aux sorties des villes du Nord dont les quartiers sont bouclés et la population cloîtrée dans les habitations. C’est le chaos ; Il n’y a plus d’eau, plus d’électricité, Les villes et les garnisons sont évacuées les unes après les autres par l'armée qui bat en retraite pendant que les combattants de l’Azaouad avancent.
Vous ne me direz pas Monsieur le Premier ministre, qu’en votre qualité d’homme d’Etat vous n’auriez pas décelé la moindre hésitation chez vos interlocuteurs de la MINUSMA, la moindre tension chez vos officiers, vos hommes de troupes déjà fortement secoués par la tension, la solitude, l’abandon, affaiblis par la rigueur du climat en cette période caniculaire de l’année.
Vous ne me direz pas qu’en votre qualité de Premier ministre, homme d’Etat, responsable et soucieux de la cohésion sociale, qu’il fallait coûte que coûte, organiser cette réunion au Gouvernorat, discuter avec les administrateurs, recenser leurs difficultés , alors qu’au même moment le gouvernorat essuie déjà les tirs nourris du MNLA. Churchill n’aurait pas commis en son temps, une telle imprudence.
Non Monsieur le Premier ministre ! Ce n’est pas seulement pour améliorer les conditions de vie de l’administration régionale que vous vous êtes rendus à Kidal. Depuis votre passage, elle est partie en fumée cette administration, transformée en chaleur et en lumière.
Vous auriez mieux fait à votre arrivée à Kidal, de vous rendre directement au QG du MNLA. Vous auriez par cette initiative obtenu l’amitié des groupes armés et relancé sans aucun doute le processus du dialogue inclusif tant souhaité par tous. Vous auriez ainsi prouvé à tous les acteurs de la crise que vous êtes un homme de paix et de dialogue.
Monsieur le Premier ministre, au lieu de vous répandre aujourd’hui, en argumentaire inutile sur votre déplacement risqué, proche du suicide collectif, pour vous et pour les hommes qui vous accompagnent et ceux qui vous ont accueillis, vous devriez plutôt reconnaître votre erreur et prendre les dispositions rapides pour protéger les populations arabe et touarègue du Nord, avant que cette crise ne se transforme comme par le passé en représailles aveugles et injustifiées contre nos parents. Cette situation chaotique et l’échec patent de votre armée à Kidal, mettent en cause l’opportunité de votre visite, et vous devriez en tirer tous les enseignements et toutes les conséquences.
Nous membres de la communauté arabo berbère, et membres de la société civile, nous nous soucions surtout du sort des populations civiles, les femmes, les enfants et les vieillards restés coincés dans les villes exposés aux exactions, à la violence, aux tueries. Nous attirons votre attention et celle de la Minusma de la CEDEAO, de l'Union du Maghreb Arabe, de l'UE sur le sort de nos pauvres populations à Gao, Tombouctou, Kidal et même au Sud. Vous auriez pu nous épargner aussi le deuil des fonctionnaires, et des militaires et le malheur qui a frappé leurs familles respectives.
Le conflit entre l’armée et les mouvements armés ne nous concerne pas. Il existe déjà des hommes pour traiter ce dossier et gérer ce conflit aussi bien sur le plan politique que militaire. Les groupes armés disposent d’hommes de grandes qualités, compétents et dotés d’une solide expérience dans le domaine de la guerre, de la négociation, tout comme il en existe au Mali. Notre principal souci à nous, demeure le sort de la population civile.
Comment peut-on expliquer que pendant que des militaires touaregs maliens vous défendent à Kidal, vous protègent par leurs corps, et vous ont extirpés il ya deux jours, des locaux du Gouvernorat de Kidal, sous un déluge de feu, comment peut-on comprendre que les parents de ces mêmes soldats touaregs MALIENS sont pris pour cibles dans les villes ? Peut-on comprendre ou accepter que des soldats maliens touaregs de grande valeur tombent et meurent sur les champs de bataille pour le Mali, pendant que leurs familles subissent les menaces d'exactions et de mort ? Ceci est inadmissible.
Nous exigeons que vous preniez immédiatement les dispositions et que vous donniez les instructions claires et précises aux forces de l’ordre, aux dirigeants des mouvements d’auto défense et ceux qui alimentent et canalisent ces mouvements, afin d’arrêter les exactions contre nos communautés arabo berbères. Le temps où l’on massacre les nomades dans le silence total et l’indifférence absolue est révolu. Nous continuerons d’exister et l’Azaouad est notre terroir. La paix est encore possible. Les groupes armés (MNLA/MAA) privilégient toujours le dialogue. Une seule chose est aujourd’hui sure : Le dossier a changé dans le fonds et dans la forme. Le statut de l’Azaouad ne sera plus le même.
Monsieur le Premier ministre, Ressaisissez l’occasion et allez aux pourparlers de paix. Nous prions Allah le Tout Puissant de ramener la paix et la quiétude dans nos esprits et éloigne de nous la haine et la rancœur Amine
A bon entendeur salut !
Mohamed Ould moydidi
jekaniya@yahoo.fr
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